L’exposition aux champs électromagnétiques est encadrée au niveau européen par des directives et des recommandations.
QU’IMPOSE LA RÉGLEMENTATION EUROPÉENNE ?
L’Union européenne utilise deux catégories d’actes, les actes juridiques obligatoires comme les directives qui s’imposent à tous les États membres, tenus de les transposer dans leur législation, et les actes non contraignants comme les recommandations, dont la transposition en droit national est laissée à l’appréciation de chaque Etat membre. Ces recommandations ont toutefois une forte valeur politique puisque ces actes expriment la position d’une institution sur un sujet donné.
« UN NIVEAU ÉLEVÉ DE PROTECTION DE LA SANTÉ CONTRE LES EXPOSITIONS AUX CHAMPS ÉLECTROMAGNÉTIQUES »
En juillet 1999, le Conseil des Ministres de la Santé de l’Union Européenne a adopté une Recommandation sur l’exposition du public aux champs électromagnétiques (référence RE 1999/519/CE), qui s’appuie sur la publication de l’ICNIRP de 1998 et en reprend l’approche de protection et les valeurs limites. Cette recommandation couvre toute la gamme des rayonnements non ionisants, de 0 à 300 GHz. Elle se fixe pour objectif d’apporter aux populations « un niveau élevé de protection de la santé contre les expositions aux champs électromagnétiques ». Ainsi, en fixant les limites d’exposition à un niveau 50 fois inférieur au seuil d’apparition des premiers effets, il est considéré que « la présente recommandation couvre implicitement les effets éventuels à long terme ». C’est pourquoi elle préconise d’appliquer ces limites seulement « lorsque la durée d’exposition est significative ».
SUR QUELLE BASE REPOSE LA RECOMMANDATION EUROPÉENNE ?
Dans le domaine des basses fréquences, les seuls effets avérés sont l’induction de phénomènes électriques (courants et champs électriques) dans le corps, phénomènes qui sont susceptibles d’entrainer une excitation intempestive des tissus nerveux. La limite fondamentale d’exposition va donc se fonder sur la limitation de ces phénomènes électriques induits, en l’occurrence des courants induits. Selon la classification établie par l’OMS en 1987[1], les effets sont négligeables en deçà d’une densité de courants induits de10 mA/m². La Recommandation européenne va adopter pour le public un facteur de sécurité de 5 et ramener la limite fondamentale (appelée « restriction de base » dans le texte) à 2 mA/m² pour le public. A partir de cette restriction de base, et en cohérence avec la publication ICNIRP de 1998, le texte européen retient que les expositions inférieures à 100 µT et 5000 V/m (appelés « niveaux de référence » dans le texte) pour les champs 50 Hz garantissent le respect des 2 mA/m² au niveau des tissus nerveux les plus sensibles, c’est-à-dire ceux du système nerveux central.
[1] Voir le fiche dédiée n°19 « Comment sont établies les limites d’exposition »
Limites Recommandées | Définition | Unité de mesure | Valeur limite à 50 Hz |
---|---|---|---|
Restriction de base | Densité de courant induit dans le corps | milliAmpère par mètre carré (mA/m²) | 2 mA/m² |
Niveaux de référence (limite mesurable) | Champ électrique | Volt par mètre (V/m) | 5000 V/m |
Champ magnétique | microTesla (µT) | 100 |
Une base scientifique régulièrement évaluée
La base scientifique de la recommandation européenne est une publication de 1998 et on peut donc légitimement se poser la question de savoir si elle reste toujours d’actualité. En pratique, le texte même de la Recommandation intègre des dispositions afin de procéder régulièrement à une mise à jour des connaissances scientifiques. En pratique, l’Europe a mandaté à 4 reprises (en 2003, 2006, 2009 et 2015) un comité scientifique pour faire l’évaluation des nouvelles études publiées sur le sujet, les 3 dernières itérations ayant été réalisées par le comité européen SCENIHR[1]. Le dernier rapport date de 2015[2] et conclut, comme les fois précédentes, que les nouvelles études ne changent pas le bilan antérieur des connaissances. Implicitement, cela veut donc dire qu’il n’y a aucune raison scientifique de revoir la Recommandation de 1999 et que les limites d’exposition restent pertinentes par rapport à l’état des connaissances.
[1] Scientific Committee on Emerging and Newly Identified Health Risks
[2] Accessible ici : https://ec.europa.eu/health/scientific_committees/emerging/docs/scenihr_o_041.pdf
LA LIMITATION DES EXPOSITIONS DES TRAVAILLEURS
Après une première tentative en 2004 (ce texte a posé à l’époque des problèmes d’applicabilité), le Parlement européen a adopté en 2013 une directive sur la limitation des expositions professionnelles aux CEM, sous la référence 2013/35/UE. Comme la recommandation européenne, cette directive reprend l’approche et les valeurs limites de l’ICNIRP, mais cette fois en s’appuyant sur la mise à jour de 2010 pour le domaine des basses fréquences.
Contrairement à la Recommandation qui n’était qu’incitative, la Directive est d’application obligatoire et a dû être transposée par les Etats Membres de l’Union Européenne[1]. Quelles sont les limites proposées pour les travailleurs à 50 Hertz ? Il y a plusieurs niveaux mais les premiers sont de 10 000 V/m pour le champ électrique et 1000 µT pour le champ magnétique. On voit que ces valeurs applicables aux travailleurs sont supérieures à celles préconisées pour le public, ce qui est d’ailleurs la règle générale en la matière, mais les deux systèmes sont cohérents : ainsi, une réglementation récente au niveau européen a confirmé l’approche et les valeurs limites du texte plus ancien applicable au public.
Dès 2004, RTE a lancé un projet d’entreprise visant à mettre l’entreprise en conformité avec les prescriptions de la directive de 2004. Ce projet a consisté à analyser l’ensemble des situations d’exposition professionnelle dans l’entreprise et à définir et mettre en œuvre les actions de prévention des risques de dépassement des limites d’exposition. Même si cette directive de 2004 n’a finalement jamais été applicable, tout ce travail a facilité la mise en œuvre de la directive de 2013 et RTE applique aujourd’hui l’ensemble des exigences réglementaires de la directive et de sa transposition dans le code du travail français.
[1] La France l’a fait en 2016 par le décret 2016-1074, accessible ici : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/8/3/ETST1611714D/jo